Une récolte forte en Chetoui !

Après un certain nombre d’incertitudes météorologiques et de changements de dates, nous voilà enfin, mon compère et associé Armand et moi dans le vol AF1084 de 6:45 direction Tunis, prêts à rejoindre notre ami Saber, rencontré en formation à Gordes, qui nous a invité à venir récolter ses olives dont il fera un pur jus monovariétal de Chetoui, une variété tunisienne de caractère !

« Attention c’est frais ! » Les ouvriers travaillent encore sur le chantier du moulin tout neuf que Saber a installé pour presser ses olives et celles des producteurs de la région. La saison de la récolte ne fait que commencer et déjà le moulin tourne à plein régime. Les agriculteurs, qui se réunissent autour du feu en attendant impatiemment que le fruit de leur récolte soit transformé en or vert, sont heureux de profiter de ce moulin moderne qui va élever le niveau de qualité de la zone du Kef.
“Le moulin le plus proche est à 30 km et il n’est pas aussi moderne que celui-ci” se réjouit Saber. En effet, les conditions sont idéales et le bouche à oreille fonctionne tellement bien que la liste d’attente des producteurs voulant presser leur récolte s’allonge un peu plus chaque minute. Les palox sont vite tous remplis de ces petites olives Chetoui naturellement colorées et cabossées… Même la récolte de Saber, pourtant propriétaire des lieux, devra un peu patienter avant d’être pressée ! “C’est chez moi mais je dois attendre comme tout le monde, bientôt il va falloir que je mette 10 dinars dans la poche de mon frère pour passer plus vite” plaisante-t-il.


Ce moulin est aussi une histoire de famille puisque Saber s’est entouré de ses trois frères, qui ont tous mis sur pause leurs emplois respectifs le temps de récolter, de lancer le moulin et de manager l’équipe sur place. Le succès est tel qu’ils doivent déjà former de nouveaux employés afin de faire tourner le moulin 24/24h et Saber songe déjà à installer un nouveau moulin, d’une capacité supérieure, pour atteindre les 160 tonnes/ jour la saison prochaine et à surmonter le tout de panneaux solaires pour en autonomiser le fonctionnement. En attendant, ce pluri-entrepreneur prévoit aussi d’installer un café où les producteurs qui attendent leur tour au moulin pourront se détendre et une boutique pour vendre des produits locaux, dont son zit zitoun (huile d’olive), aux voyageurs passant sur la route adjacente.

Tel un trésor dans un film d’aventure, le domaine de Saber est caché dans les montagnes, bordé de canyons à la terre rouge, et on y voit à perte de vue des oliviers jeunes et centenaires, des figuiers de barbarie, de l’aloe vera et de la roquette sauvage en fleur qui pousse avec la vigueur d’une mauvaise herbe. On s’y rend en 4×4 car les routes sont cahoteuses et Saber s’amuse à rouler entre les oliviers et les amandiers de son domaine. L’odeur de roquette sauvage qu’on a écrasé en roulant parfume l’air ambiant et emplit nos narines. “J’adore venir me promener ici, les olives c’est mes filles, je leur parle, je les cajole” nous confie-t-il avant d’embrasser une branche en lançant un “comment ça va, toi?”. Notre visite se termine par un magnifique coucher de soleil et la promesse d’une seconde journée de récolte chargée.

Le lendemain lorsque le réveil sonne, il est cinq heures, Le Krib s’éveille. Il fait encore nuit lorsque nous nous rendons dans l’oliveraie pour attendre l’équipe de récolte. Ici ce sont les femmes qui récoltent les olives, munies d’un sac en jute, de leur filet et de leur peigne – parfois sans peigne, une vraie récolte “à la main” – qu’elles transportent d’un arbre à l’autre. Elles sont payées au sac rempli et ce sont elles qui décident si elles viennent récolter ou pas, plusieurs hommes nous affirment, plutôt fièrement, que ce sont les femmes qui font fonctionner l’économie du pays et d’autres regrettent que les hommes en général ne veuillent pas faire ce travail.

C’est d’autant plus dommage que la récolte de cette année, profitant de pluies favorables, sera exceptionnelle pour la Tunisie – les projections chiffrent la récolte à 350.000 tonnes d’huile contre une moyenne de 185.000 tonnes pour les années précédentes (1) et le pari est lancé pour que la Tunisie décroche la 2e place du podium derrière l’Espagne, qui espère produire 1.35 million de tonnes d’huile d’olive (2), délogeant ainsi la Grèce dont la récolte est estimée 300.000 tonnes, ce serait l’olive sur le gâteau !
La main d’oeuvre manquant et la demande étant élevée, les femmes ont, à juste titre, augmenté le prix qu’elles demandent pour un sac de 15 à 20 dinars.
Nous nous joignons à l’une d’entre elles et nous l’aidons à peigner l’olivier, comme si on voulait démêler les cheveux de ces arbres verts et argentés. Égayés par le timide soleil qui nous réchauffe le dos nous poussons la chansonnette sur un classique de Disney et elle sifflote un air avec nous. Saber nous avait prévenu “récolter des olives c’est la séance de relaxation ultime”: méthode testée et approuvée !

Nous repartons à Paris bien avant la fin de la récolte, qui pourrait s’étendre sur un mois entier ou plus, les yeux emplis de la lumière rosée et diffuse du ciel tunisien, les narines emplies de l’odeur sucrée des clémentines, poivrée de la roquette sauvage et herbacée de l’huile sortant fraîche du moulin et les valises chargées de zit zitoun, de Chetoui, bien évidemment !

 

Sources: 1. African Manager – 21/10/2019 https://africanmanager.com/huile-dolive-un-millesime-exceptionnel/2. Olive Oil Times – 03/07/2019  https://bit.ly/2rsAU4P  Écrit à quatre mains par Armand Erba et Paméla Dubois. Crédits Photos Armand et Paméla.

 

Retrouvez les pépites d’Armand et Paméla sur le site www.chercheursdorvert.fr, ils sélectionnent les meilleures huiles d’olives de France et d’ailleurs pour ravir vos papilles. Ils distribuent l’huile Chetoui de Saber pour les restaurateurs et pour les particuliers sur demande.

 

 

 

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